La cyclo logistique : un modèle d’avenir pour la logistique urbaine ?
13 février 2025 par Edina GÁLFI
13 février 2025 par Edina GÁLFI
Le Forum de la Cyclo Logistique, organisé à Lyon le 22 janvier 2025, a rassemblé des experts, des entreprises et des représentants des pouvoirs publics pour discuter des avancées et des défis de ce secteur en pleine expansion. Cet événement a mis en lumière les initiatives existantes et les solutions envisageables pour intégrer la cyclo logistique dans les systèmes de distribution urbaine de manière efficace et durable.
L’essor des villes et l’augmentation du trafic routier rendent nécessaire l’adoption de solutions innovantes pour assurer la livraison des marchandises tout en limitant les nuisances environnementales. La cyclo logistique, qui repose sur l’utilisation de vélos cargos et de remorques pour la distribution urbaine, se présente comme une alternative durable aux moyens de transport traditionnels.
Selon le troisième Observatoire des cyclo mobilités professionnelles publié le 10 décembre 2024 par l’association Les Boîtes à Vélo – France, la France compte environ 3 400 vélos-cargos en exploitation, dont 84 % sont dédiés aux activités de cyclo logistique. Ces flottes sont majoritairement concentrées dans les grandes agglomérations, avec l’Île-de-France en tête (1 450 unités, dont 76 % à Paris intramuros), suivie de la région Auvergne-Rhône-Alpes (570 unités, principalement dans le Rhône)
En termes de types de véhicules, le tricycle ou triporteur est le plus utilisé, représentant 47 % des flottes, suivi des biporteurs (29 %) et des remorques (13 %). Les vélos électriques compacts et classiques constituent les 11 % restants.
La cyclo logistique présente des avantages significatifs tant sur le plan économique qu’écologique. Selon l’Observatoire, le coût de la cyclo logistique est jusqu’à huit fois inférieur à celui des livraisons effectuées par des véhicules utilitaires légers (VUL). De plus, les émissions de gaz à effet de serre sont 15 fois moindres, et l’espace foncier utilisé est réduit de 90 %
En moyenne, chaque vélo-cargo parcourt 24 km par jour et transporte jusqu’à 117 kg de marchandises, des chiffres adaptés aux besoins de la logistique du dernier kilomètre dans des centres-villes souvent saturés.
Le secteur de la cyclo logistique en France est composé d’environ 200 entreprises réparties dans 74 villes. Parmi elles, 68 % opèrent quasi exclusivement à vélo ou vélo cargo, tandis que les autres combinent des flottes mixtes incluant des véhicules thermiques. La majorité de ces entreprises sont des très petites entreprises (TPE) (67 %) et des petites et moyennes entreprises (PME) (30 %)
En 2022, le secteur a généré un chiffre d’affaires compris entre 80 et 85 millions d’euros, dont la moitié réalisée par seulement six entreprises. Les salariés du secteur représentent entre 2 200 et 2 400 équivalents temps plein (ETP), dont 400 à 450 ETP dédiés aux fonctions support.
L’entreprise Chronofresh, filiale de Geopost spécialisée dans la livraison de produits frais, a mis en place un Espace Logistique Urbain (ELU) au sein des Halles Bocuse à Lyon. Cette initiative, présentée par Paul Wagner (responsable développement) et Sylvain Reynaud (directeur d’agence), repose sur un modèle novateur combinant plateforme de préparation et de dispatch à Corbas, et livraison en centre-ville par vélo cargo.
Lors du forum, deux principaux modèles d’organisation des tournées ont été identifiés :
Malgré une croissance soutenue, le secteur de la cyclo logistique fait face à plusieurs défis. Les coûts d’entretien annuels des vélos-cargos varient entre 2 000 et 6 000 euros en raison de leur utilisation intensive. De plus, la demande peut être saisonnière, notamment dans les secteurs du commerce et des services, ce qui pousse certaines entreprises à envisager la mutualisation de leurs flottes.
Néanmoins, les perspectives demeurent prometteuses. Près de 83 % des entreprises interrogées prévoient une croissance de leur chiffre d’affaires, et 47 % envisagent de recruter. Le soutien des collectivités locales est également crucial pour accompagner cette transition, notamment en matière de financement, d’infrastructures et de mise en réseau de l’écosystème
Le développement de la cyclo logistique nécessite un accompagnement des pouvoirs publics. Lors du forum, plusieurs représentants institutionnels ont partagé leurs initiatives pour favoriser ce mode de livraison durable.
La Métropole de Lyon travaille sur un schéma logistique des biens et des services visant à encourager la livraison urbaine par des moyens écoresponsables. De son côté, LPA Mobilité, gestionnaire de parcs publics, explore des solutions pour adapter les parkings sous-terrains à la logistique urbaine.
Les parkings anciens (avec une hauteur limitée à 1m90) représentent un défi, tandis que les infrastructures plus récentes offrent des possibilités d’aménagement. De plus, le Port Édouard Herriot, avec ses 30 000m², constitue un pôle logistique essentiel pour la ville.
La Direction Générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer (DGITM) prévoit de créer une cellule dédiée à la cyclo logistique dans le cadre du prochain mandat. Cette mesure souligne la volonté de structurer et d’accompagner le déploiement de ce modèle à l’échelle nationale.
La cyclo logistique s’affirme comme une solution d’avenir pour la logistique urbaine en France. Ses avantages économiques et environnementaux, combinés à une adaptation aux contraintes des centres-villes, en font une alternative crédible aux modes de transport traditionnels. Avec le soutien des acteurs publics et privés, la cyclo logistique est bien positionnée pour jouer un rôle clé dans la transformation des systèmes de livraison urbains, contribuant ainsi à des villes plus durables et agréables à vivre.